La SNCF et la RATP sont deux entreprises d’Etat assises sur une forte notoriété dans le milieu du transport et des services publics. Elles s’appuient sur des millions d’utilisateurs, qui mettent à rude épreuve leurs matériaux, produits, concepts et services au quotidien. En bref, ces entreprises sont confrontées à une délicate gestion des relations avec leurs publics, qu’elles soient simples utilisateurs ou abonnés de longue date. Ces relations publiques sont d’autant plus sensibles que l’image de ces deux entités est régulièrement mise sur le devant de la scène, pas toujours de manière contrôlée, au fil des manifestations, accidents, retards et autres mouvements syndicaux qui font l’actualité de notre pays.
Les usagers de la SNCF comme de la RATP utilisent comme de plus en plus d’internautes les espaces de discussion que constituent les forums, blogs, chat et autres sites de la mouvance Web 2.0 depuis quelques années afin de conter leurs expériences, étonnement, agacements et autres critiques des services mis en place. Les deux entités n’avaient jusqu’ici que peu de moyens de contrôler l’information qui circule sur le Web. Information qui peut très rapidement devenir rumeur, rumeur pouvant tout autant devenir détournement, détournement finissant par se transformer en action d’agitation-propagande orchestrée par des lobbys particulièrement bien organisés…On commence à en voir la démonstration ici ou là. On comprend donc que ces deux entreprises devaient mener une véritable réflexion en profondeur afin de définir les moyens leur permettant de maîtriser au minimum leur image tout en travaillant sur leur propre réputation en ligne.
Les deux entreprises se sont donc intégrées cette année dans le monde de la conversation sur le Web. Si elles-deux disposaient déjà de nombreux sites Internet, corporate, de marque, par région ou encore par segment, aucun d’entre eux ne pouvait réellement encourager le dialogue et ne pouvait y répondre de manière personnalisée et suivie. Les utilisateurs internautes n’avaient jusqu’à aucun moyen évolué d’entrer en contact avec ces institutions et pouvaient, de ce fait, se sentir incomprises. Les milliers de messages diffusés sur les forums, blogs, tchat et autres réseaux sociaux gravitent en permanence autour des marques en constituant le meilleur exemple. Il suffit de constater les réactions déchaînées d’internautes mécontents postés sur différents supports suite aux pannes intervenues cet été sur le site marchand Voyage-SNCF…
La SNCF a ouvert le site Débats SNCF avec pour objectif de promouvoir le dialogue entre les porte-parole de la SNCF et les internautes. L’opération a été pilotée par l’agence Publicis Consultants. La plateforme utilisée est celle de Feedback 2.0. Le principe est limpide : les internautes, après s’être enregistrés, peuvent poser des questions à l’un des 10 représentants de l’entreprise et espérer une réponse de leur part sous quelques jours, parfois plus. La présentation des questions se fait sous la forme de « thread », soit de fil de message se répondant les uns aux autres. Ainsi, les internautes utilisateurs du service peuvent préciser la question, l’enrichir de remarques ou répondre directement aux réponses fournies par l’expert SNCF. Un principe intéressant, qui se rapproche du forum et du fonctionnement d’un digg-like. En effet, les utilisateurs peuvent voter en faveur ou contre une question, qu’ils estimeront plus ou moins intéressants. Et qui dit plus d’appréciations, dit plus de visibilité des questions, qui se retrouve en tête de liste sur le site. En prenant un peu de recul, on se rend compte que le site sert de canalisateur à des rumeurs, mécontentement et autres désagréments vécus par les utilisateurs, tout en travaillant son image de proximité et de professionnalisme. Une approche intéressante, donc, qui se rapproche en fait d’autres plateformes mises en place par le même éditeur telles que le Norton Café.
La stratégie de la RATP est quelque peu différente de celle de la SNCF, même si elle obéit au même objectif d’amélioration de son image à travers une relation client de meilleure qualité. Il y a plus d’un an, la RATP a lancé le site Vous et la RATP afin de développer un espace d’échanges entre usagers de la RATP, agents et responsables de l’entreprise publique sur Internet. Il s’agit, avec ce site, avant tout de valoriser les idées des usagers à travers une plateforme issue de la collaboration entre l’agence Human to Human et les créatifs d’Upian. Le site permet, après une inscription d’une grande simplicité, de proposer des évolutions de service, des conditions de voyage, d’information ou encore de sécurité aux administrateurs de la RATP. Les internautes peuvent par la suite commenter ces propositions et les noter, comme sur Débat SNCF. Mais là où le fonctionnement change, c’est dans la réponse de l’entreprise. Sur le site de la SNCF, les commentaires sont promus en première page, les responsables clientèle sont présentés fièrement, les questions les plus lues mises en avant. La conversation est au coeur du site. Sur le site de la RATP, par contre, c’est la personnalisation de l’interface de l’inscrit qui semble compter. On lui parle de sa ligne de métro, des projets qui le concernent. Une approche donc adaptée.
Enfin, je crois me souvenir qu’au départ « Vous et la RATP » permet à la RATP de valider des propositions innovantes. Ce n’est plus le cas. Depuis la refonte, cette partie semble avoir été redirigée vers le site de La Fabrique RATP, encore en bêta, qui devrait prochainement permettre aux internautes de tester des solutions et de s’exprimer à travers des sondages en avant-première. Dommage, cette approche permet de valider définitivement les propositions des utilisateurs, et ainsi de les valoriser.
Ces portails ne sont pas des forums, ne sont pas des boîtes à idées, ne sont pas des réseaux sociaux non-plus. C’est mieux. Ce sont de réels espaces de discussion en ligne intégrés, permettant de valoriser les apports des usagers comme de partager leurs soucis avec les responsables de la marque. Nouveaux sur les marchés européens, ils existent depuis quelques années sur le marché américain, à l’étape du très bon Ford Answer Center, s’appuyant sur la technologie Yahoo! Answer, permettant aux clients Ford de consulter la communauté afin de répondre à leurs problèmes.
Alors les plateformes de feedback, futur de la relation client ou simple outil supplémentaire ?
Le débat est ouvert.
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