De manière opportunément synchronisée avec la bonne tenue de ses résultats, Apple a donc annoncé le milliard d’applications téléchargées sur l’iPhone. En seulement neuf mois. Il y avait 500 applications au lancement, aujourd’hui 250 000. En neuf mois donc. On peut en installer jusqu’à 148. Personnellement, j’en ai 69. Pendant de cette réussite et métrique encore plus signifiant, si l’iPhone ne pèse « que » 11% du marché des SmartPhones, il apparaît déjà, le mois dernier , 50% du trafic mobile aux USA et 33% à l’échelle mondiale.
Toute la puissance du modèle est ici résumée. L’iPhone n’est pas un téléphone, c’est une Economie, qui profite aux opérateurs et à la profusion d’éditeurs qui ont fabriqué ce quart de millions d’applications pour tout et rien. Des applications qui n’ont pas côté grand choix, qui plus est compte tenu de la vitesse avec laquelle le catalogue s’est constitué. Des applications qui consomment du trafic au profit des opérateurs, de l’attention et du trafic aux éditeurs gratuits, du revenu aux éditeurs payants. Les applications iPhone ne sont pas très coûteuses, le cût à l’entrée est tellement faible qu’il en est inexistant. La valeur d’usage de quelque chose proche d’un café au comptoir est sans rapport. On est dans une économie de flux et de petites sommes.
Firefox a aussi son milliard de téléchargement de plug-in. Salesforces avait lancé le mode des écosystème, un modèle repris avec succès par Facebook, même si je ne comprends toujours pas pourquoi il n’en tire aucune monétisation. De fait, le milliard d’Apple, et surtout la rapidité dans l’atteinte de ce résultat, est bien une leçon d’économie moderne, avec rapidité de constitution d’une offre variée et surtout un modèle sous forme de marché, comme ceux de Google ou d’Amazon.
Sur le fond, le vrai changement, l’essence même de l’économie de la connaissance, c’est de voir la constitution de marchés organisés par et autour d’un centre opérateur. C’est le cas de Google, qui organise l’information pour fabriquer du flux rémunérateur, d’Amazon qui organise l’univers de la culture en motorisant et collectant des revenus sur les échanges, d’eBay dans son domaine, où donc d « Apple, qui ne vend pas un téléphone ou un ordinateur de poche, mais un univers entier de services.
Il est frappant de voir le monde des médias couiner de l’asservissement qu’ils perçoivent de la part de Google, sans que presque personne ne presse ce qu’annonce la v3.0 de l’iPhone. Et aucun libraire ne s’est plaint, que je sache, de ce que fait Amazon sur le livre par exemple. Les débats sur le Kindle et le libre électronique sont sans rapport avec la vague qui se présente.
Apple l’avait fait avec la musique, mais a été encore plus vite sur le mobile en crowdsourcing du développement applicatif. Il s’apprête à étendre le jeu sur la distribution des contenus. iTunes va finir par être une sorte de minitel 3.0, la plateforme à tout faire, passage obligé de tout producteur.
La nouvelle économie, ce n’est pas lancer des produits ou des services, c’est créer des écosystèmes économiques tout court, c’est fixer les règles du jeu d’un environnement. Cela demande de la légitimité, du poids et une stratégie produite de la variété et de la vitesse à agréger l’ensemble des acteurs autour du modèle proposé. Ça s’appelle rien moins que de la distribution, mais à l’ère numérique, c’est beaucoup plus intégré et sociétal.